Quand on parle de faux aveux, on pense systématiquement aux aveux faits à la police lors d’une enquête.
Et on a vu dans l’épisode précédent que certaines méthodes d’interrogatoires policiers posent problème car elles ont une fâcheuse tendance à produire de faux aveux.
L’histoire de Patrick Dils en est malheureusement un triste exemple.
Mais, si vous pensez être à l’abri parce que vous n’êtes pas impliqué dans une affaire criminelle, vous vous trompez.
Car il n’y a pas que la police qui peut vous soutirer de faux aveux.
Vous êtes en réalité cerné par nombre de personnes qui peuvent à tout moment vous faire dire tout et surtout … n’importe quoi.
(La transcription de l’audio en texte est disponible plus bas)
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🟠 Sources :
« The myth of repressed memory » d’Elizabeth Loftus et Katherine Ketcham (1994)
« The psychology of false confessions. Forty years of science and practice » G.H. Gudjonsson (2018)
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🟠 L’épisode :
00:00 ⇒ Introduction de l’épisode
01:09 ⇒ Les faux aveux chez les adultes et les 3 sphères de nos vies qui nous menacent.
02:36 ⇒ Les groupes d’appartenance
04:29 ⇒ Les familles
06:31 ⇒ Les figures d’autorité en lien avec la santé physique et mentale.
08:07 ⇒ Conclusion : 3 facteurs qui contribuent à ce phénomène.
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🟠 « La petite Histoire des manipulations » est un podcast de criminologie et de criminalistique dédié à la prévention et à l’éducation contre les manipulations.
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LinkedIn : Coraline Hausenblas
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🟠 Je suis Coraline Hausenblas, criminologue/victimologue experte en analyse d’écriture et de documents.
Ancienne psychomotricienne Diplômée d’Etat, mon travail repose sur une approche transdisciplinaire qui mêle psychologie, psychomotricité, linguistique et criminologie.
Je suis membre de l’International Association for Forensic and Legal Linguistics et formée à la psychologie criminelle par le Forensic Criminology Institute de Sitka, USA.
🟠 Si vous souhaitez savoir ce qu’est une expertise d’écriture et de documents,
Vous pouvez télécharger l’analyse scientifique complète sur la fausse lettre du Titanic
🟠 Transcription de l’épisode :
Bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast, « La petite histoire des manipulations ». Ce podcast est consacré à la criminologie et à la criminalistique.
Je suis Coraline, criminologue experte en analyse de documents, et aujourd’hui on va continuer de parler du phénomène de faux aveux et de comment ils peuvent nous être arrachés.
L’obtention de faux aveux est un phénomène troublant et complexe.
Et ce phénomène peut avoir des conséquences désastreuses sur la justice et sur nos droits individuels.
On aime croire que les faux aveux, ça n’arrive qu’autres autres. Que ça ne concerne que les personnes les plus fragiles de la société et que donc, nous sommes protégés.
Mais c’est mal connaître les procédés manipulatoires qui sont à l’œuvre.
Plusieurs éléments contribuent à faciliter l’obtention de faux aveux chez les adultes.
Et si on a parlé de ce phénomène chez les ado lors d’un interrogatoire policier lors du dernier épisode, on va parler aujourd’hui de 3 sphères de nos vies qui ont en général suffisamment d’autorité sur nous pour nous faire dire n’importe quoi.
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1 – Les groupes d’appartenance
La première sphère est celle de nos groupes d’appartenance.
Nous appartenons tous à des groupes : ça peut être la famille, les amis, les collègues, mais aussi les personnes que nous côtoyons dans nos rassemblements politiques, militants ou religieux.
Et ce qui nous échappe la plupart du temps, c’est que ces groupes nous demandent souvent une adhésion à leurs idées et à leurs croyances.
Et tant que nous restons persuadés que les croyances du groupe sont aussi les nôtres, tout va bien.
Mais le jour où nous commençons à questionner certaines choses ou à prendre nos distances avec certaines attitudes, le groupe peut se montrer particulièrement féroce.
Peut se déployer alors une forte pression sociale pour que nous nous conformions aux normes et aux attentes du groupe.
Les figures d’autorité au sein de ces groupes, mais aussi n’importe quelle personne du groupe, peuvent exercer une influence de plus en plus forte sur nous.
Et parfois, cette pression peut prendre la forme d’un faux aveu qui nous est extorqué pour s’assurer de nous remettre « dans les rails » et de ne plus moufter ou alors pour nous exclure tout bonnement.
C’est une pratique connue dans certaines sectes par exemple.
Une personne est un jour accusée de quelque chose qu’elle n’a pas commis. Le gourou et l’ensemble du groupe vont alors mener une campagne de pression psychologique sur l’accusé jusqu’à ce qu’il finisse par craquer et avouer pour qu’on lui fiche la paix.
La pression sociale est une arme redoutable pour soumettre quelqu’un, et les familles l’ont aussi bien compris.
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2 – Les familles
Parce que oui, notre deuxième sphère pouvant nous amener à produire de faux aveux, c’est la famille.
Les conjoints, les parents ou les enfants peuvent facilement produire de faux aveux.
Les motifs ici ne manquent pas : protéger un tiers de conséquences judiciaires, protéger un secret de famille ou encore éviter l’éclatement de la famille.
Par exemple, un parent peut exercer une pression émotionnelle ou psychologique sur un enfant, que celui-ci soit mineur ou majeur. Un enfant devenu adulte qui reste terrifié d’un parent peut être amené à dire n’importe quoi pour éviter la fureur du parent qu’il redoute.
Mais il y a aussi des situations dans lesquelles par exemple, une personne préférera dire qu’elle a commis un délit ou un crime pour protéger son époux ou son épouse.
Dans certaines affaires criminelles, on a même des enfants qui s’auto accuse d’un fait qu’ils n’ont pas commis pour protéger un parent criminel.
C’est particulièrement vrai dans les très graves cas de lavage de cerveau dans lesquels les enfants victimes d’inceste sont manipulés pour croire qu’ils ont provoqués le parent criminel.
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3 – Toute figure d’autorité en lien avec la santé physique et mentale.
La troisième sphère de nos vies qui peut nous faire dire tout et n’importe quoi… c’est la sphère médicale.
Et oui, on n’y pense pas forcément, mais détenir une autorité médicale ou paramédicale ça peut conduire certaines personnes à pas mal d’abus.
Parce que le drame, c’est qu’avec ou sans diplômes valides, certains thérapeutes et psychothérapeutes peuvent littéralement nous faire dire n’importe quoi.
Aux Etats-Unis, on ne compte plus le nombre de procès qui ont été fait à des psychothérapeutes, accusés et reconnus coupables, d’avoir crée de toute pièce des faux souvenirs chez leurs patients.
Si on joue avec notre mémoire pour que nous nous rappelions d’un délit ou d’un crime passé, même si ce délit ou crime n’a jamais eu lieu, certains d’entre nous finirons par avouer en toute bonne foi avoir commis cet acte alors qu’il est totalement fictif.
Les études sur les faux souvenirs ne datent pas d’hier.
Elles ont cours depuis les années 1970, et elles montrent à quel point notre mémoire est influençable. Pour vous en convaincre, vous pouvez allez voir les travaux d’Elizabeth Loftus et de ses nombreux collègues sur le sujet.
Si on manipule nos souvenirs, on peut finir par croire et dire n’importe quoi en toute bonne foi. Mais les conséquences elles, sont parfois désastreuses.
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Conclusion
Alors en conclusion, on peut résumer en disant que plusieurs sphères de nos vies quotidiennes peuvent nous amener à dire tout et n’importe quoi et même à s’auto-accuser de choses que nous n’avons pas faites.
Plusieurs raisons expliquent cela :
– Les relations et communications manipulatoires toxiques qui créent des phénomènes d’emprise psychologique.
C’est ce qu’on retrouve par exemple dans certaines familles, dans certains couples ou dans les relations gourou-adeptes.
– Le phénomène de fascination sur lequel surfe certains professionnels de santé diplômés ou certains psychothérapeutes ou coach.
La fascination peut vite mener à l’aveuglement, et certains ne se privent pas de jouer là dessus pour nous manipuler.
– Et finalement notre méconnaissance des stratégies de manipulation se retourne souvent contre nous.
Finalement, il faut bien comprendre que c’est souvent le contexte qui va permettre à une manipulation de se mettre en place et de se maintenir.
Et si ça peut vous aider à mieux comprendre ces contextes, mon livre « Communiquer pour manipuler. Comprendre les communications manipulatoires et y échapper.» peut vous aider à y voir plus clair.
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En attendant, de vous retrouver jeudi dans quinze jours pour un nouvel épisode, n’oubliez pas :
« Un grand bobard commence toujours par une petite histoire. »